Crise humanitaire au Nord-Kivu : grâce à WIMA, la Caritas Butembo-Beni assiste les peuples pygmées de Fatua
Depuis juin 2024, la zone de santé de Manguredjipa, en territoire de Lubero (Nord-Kivu), vit au rythme des atrocités perpétrées par les rebelles ADF affiliés à l’État Islamique. Les attaques successives dans le secteur de Bapere ont poussé des milliers de familles à fuir leurs villages pour trouver refuge dans des zones jugées plus sûres. Mais derrière les chiffres des déplacés, se cache une réalité encore plus cruelle pour une minorité oubliée : les peuples autochtones pygmées.
Environ 58 660 personnes déplacées internes, 66 780 membres des communautés hôtes et plus de 6 300 ménages retournés vivent aujourd’hui dans une précarité sans précédent. Pourtant, dans cette mosaïque humaine, les peuples pygmées forment un groupe minoritaire et marginalisé, souvent invisible dans les dispositifs d’assistance humanitaire classiques.
Historiquement attachés à la forêt, les pygmées du secteur de Bapere ont été contraints de l’abandonner, chassés par la guerre. N’ayant ni accès aux champs ni aux sites miniers, ils sont exclus des moyens de survie traditionnels dans cette région. Loin de leur milieu naturel, ces communautés peinent à s’adapter à un mode de vie sédentaire, imposé par la violence. Leur quotidien est marqué par la faim, le manque d’abris, l’absence de soins de santé, et un isolement social accru. Dans ce rang, les femmes et les enfants sont les premiers à souffrir de cette transition brutale et non choisie.
Face à cette détresse, la Caritas Butembo-Beni, avec le soutien financier du Réseau WIMA, a choisi d’intervenir dans l’aire de santé de Midede, dans le village de Fatua. Dans cette localité reculée, 87 ménages vulnérables ont bénéficié d’une assistance vitale, dont 61 étaient composés de pygmées déplacés par la guerre.
Bien que cette aide soit hors des standards humanitaires habituels, elle a répondu à des besoins fondamentaux : vêtements, kits d’hygiène pour les femmes et les filles, riz, sel, savon, ainsi que des sessions de sensibilisation sur l’utilisation des kits de dignité pour les femmes en âge de procréer.
Pour Jean-Pierre Alebu, chef d’un clan pygmée, cette aide est bien plus qu’un simple geste humanitaire : « Ce que vous faites pour nous, aucune autre organisation ne l’a jamais fait. Vous avez le courage de venir jusqu’à nous dans la forêt. C’est vraiment Dieu qui vous envoie. »
L’intégration des femmes pygmées

Le chef de village de Fatua, Nzanzu Matalatala Kawele, a quant à lui salué l’impact social de cette action : « Le kit de dignité favorise l’intégration des femmes pygmées. Aujourd’hui, elles peuvent prendre soin d’elles avec dignité. Mais ce dont nous avons besoin de toute urgence, ce sont des abris. Car les pygmées ne veulent plus retourner dans la forêt, avec tous les dangers qu’elle représente. »
Car c’est là le nœud du drame : si rien n’est fait rapidement, les pygmées risquent de retourner dans les forêts – leur seul refuge connu – avec tous les risques d’extermination qui y sont liés dans un contexte de guerre. Déjà minoritaires dans le secteur, ces peuples pourraient être anéantis en silence, loin des radars du dispositif sécuritaire et de l’aide humanitaire.
Grâce au soutien du Réseau WIMA, l’initiative de la Caritas Butembo-Beni montre qu’il est possible d’agir, même avec peu, et de restaurer la dignité à ceux qui n’ont plus rien. Elle rappelle aussi une urgence : protéger les peuples pygmées contre toutes les menaces qui pèsent sur ces autochtones.